ELLE
COMMENT TE DIRE...
On a tant écrit sur l’amour,
Dit tant de choses,
En vers, en prose,
Côté jardin et côté cour,
Tant chanté sous tant de balcons
Les sérénades
Et les aubades,
En tous lieux, en toutes saisons,
On a tant brodé sur le thème,
Amour vainqueur,
Amour en pleurs…
Comment te dire que je t’aime ?
Les mots ont été galvaudés,
Dits et redits
Et affadis,
Rafistolés, raccommodés,
Ils servent encore et encore,
Sans consistance
Et sans substance,
Toujours plus vains, toujours moins forts,
On a mis dans tous les poèmes
Et les romans
Tous les amants…
Comment te dire que je t’aime ?
Et si je t’offrais simplement
Trois fleurs sauvages
Et ce nuage
Cueilli pour toi au firmament,
Si je t’apportais en cadeau
Ce rai de lune,
Là, sur la dune
Avant que naisse un jour nouveau,
Si tous les violons de Bohème,
Avec ma voix,
Vibraient pour toi,
Aurai-je enfin dit que je t’aime ?
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SI J’AVAIS LE TALENT
Si j’avais le talent et l’âme d’un poète,
J’immortaliserais en une chansonnette,
Ton rire en roucoulade,
Ton œil qui me dissuade
Et m’invite à la fois,
Oui et non, chaud et froid,
La pointe de ton sein
Qui frémit sous ma main,
La courbe de ta hanche
Quand vers moi tu te penches,
Le souffle de la fièvre
Qui consume tes lèvres,
Et je te couvrirais de rimes pour ta fête,
Si j’avais le talent et l’âme d’un poète
Si j’avais le talent de Monsieur Picasso,
J’accrocherais pour toi au bout de mon pinceau,
Le bleu de la lagune,
Une corne de lune,
Un arc-en-ciel noyé
Dans un ciel délayé,
La queue d’une chimère,
Le vol d’un éphémère,
L’or de la voie lactée,
Une étoile éclatée,
Un saule au vent qui tremble,
Et combinant ensemble
Ces merveilles pour toi, j’en ferais un tableau,
Si j’avais le talent de Monsieur Picasso.
Si j’avais le talent, si j’avais le génie
De composer pour toi de grandes symphonies,
Je mettrais dans les cuivres
La folle envie de vivre
Qui me vient de t’aimer
Et que je veux clamer,
Et puis dans les violons
Un violent tourbillon
Qui s’enfle, qui s’emballe
Au rythme des timbales
Et monte au firmament
En éclaboussements.
Mais c’est dans mon esprit un embrouillamini,
Je n’ai pas de talent, je n’ai pas de génie.
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LA CHATTE SUR LE CANAPE
Quand tu t’étends, après souper,
Sur le velours du canapé,
Les yeux mi-clos, comme endormie,
Je ne peux m’empêcher, ma mie,
De penser que dans ces pénates
Tu fus autrefois une chatte.
Tu en as l’abandon factice
Et tu guettes l’instant propice
Pour m’attirer dans tes filets,
Tel un imprudent oiselet
Que tu maintiens entre tes pattes
Comme le ferait une chatte.
Et je me sais vaincu d’avance
Lorsque près de toi je m’avance,
Je sais trop bien que je ne peux
Que me laisser prendre à ce jeu
Aux subtilités délicates
Que seule connaît une chatte.
Je caresse ta chevelure
Comme on caresse une fourrure,
Je perçois instantanément
Un langoureux frémissement,
Comme quand de la main l’on flatte
L’échine douce d’une chatte.
Je te tiens dans mes bras captive,
Et bien qu’encore un peu rétive,
Mais prête déjà pour l’amour,
Ta langue lèche le pourtour
De ta bouche ouverte, écarlate,
Avec les gestes d’une chatte.
Ma caresse se fait précise,
Et loin de te montrer soumise,
Tu t’offres impudiquement,
M’attires vers toi violemment
Jusqu’à ce que mon corps s’abatte
Sur toi qui geins comme une chatte.
Maintenant tu cambres les reins
Et tu me guides de la main,
Autoritaire et suppliante,
Vers ta source humide et brûlante,
Et lorsqu’en toi soudain j’éclate,
Ton cri d’amour est d’une chatte.
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TOUT LE MONDE TE RELUQUE
Tu n’as rien d’un sex-symbole
A l’américaine,
Ni d’un’ vamp, ni d’une idole,
Ni d’un’ star lointaine,
Mais le grand sourire, mignonne,
Qui fleurit tes lèvres,
Et ton regard qui rayonne
M’ont donné la fièvre
Les octogénaires,
L’abbé, le vicaire
Et mêm’ les eunuques,
Tout l’mond’ te reluque
Quand s’effeuill’ la strip-teaseuse,
J’suis pas convaincu,
Même lorsque, langoureuse,
Ell’ montre son … nu,
Ca laiss’ pas d’plac’ dans la tête
Pour imaginer,
Toi mignonne, tes arm’ secrètes,
Faut les deviner.
Les octogénaires,
L’abbé, le vicaire
Et mêm’ les eunuques,
Tout l’mond’ te reluque
Tu n’as rien des scintillantes
Meneus’ de revue
A la démarche ondoyante
Sous la soie tendue,
Mais dans ta robe à deux sous,
Sans fair’ de tapage,
Tu mets sans dessus-dessous
Les gars du village
Les octogénaires,
L’abbé, le vicaire
Et mêm’ les eunuques,
Tout l’mond’ te reluque
Tes airs de petit’ fill’ sage,
Naïve et candide,
Allument sur ton passage
Des regards avides,
Mais toi, tes dix-huit printemps,
Tu veux les offrir
A celui qui, gentiment,
Saura les cueillir.
Les octogénaires,
L’abbé, le vicaire
Et mêm’ les eunuques,
Tout l’mond’ te reluque